Fort Carson. De notre envoyé spécial, Philippe Chapleau
Alors que le Conseil Otan-Russie se réunit ce lundi à Bruxelles, une brigade américaine se prépare à être déployée de la Baltique à la Roumanie pour une mission de dissuasion.
Le capitaine Musk a le sourire : « On a une semaine d'avance sur notre planning de déploiement ». Dans le froid sec du Colorado, l'officier du 68e bataillon de soutien supervise le départ des derniers convois ferroviaires qui quittent la base de Fort Carson pour le port de Beaumont (Texas). Destination : Brême en Allemagne puis la Pologne.
La 3e brigade de la 4e division d'infanterie va y être déployée pendant neuf mois dans le cadre de l'Initiative pour la réassurance européenne (European Reassurance Initiative), lancée par le président Obama en 2014. La brigade blindée va projeter près de 4 500 soldats et 2 000 véhicules, dont plus de 200 blindés chenillés. Une première depuis 1988 !
« La mission est triple, explique le lieutenant-colonel Capehart, qui commande le 1erbataillon du 68e régiment blindé. Il s'agit de vérifier notre capacité à projeter en Europe une brigade blindée, d'accroître l'interopérabilité lors d'une vingtaine d'exercices entre nos forces et les armées alliées des pays baltes, de Bulgarie et de Roumanie etc. Enfin, de contribuer au renforcement des capacités de défense collective face à toute menace. »
Des menaces qui, évidemment, viendraient de l'Est. « Bien sûr ! Tout ça, c'est une réponse aux Russes, surtout après l'invasion de la Crimée », reconnaît sans détour James Townsend, l'adjoint du sous-secrétaire à la Défense, chargé des questions européennes.
Une brigade, même blindée, suffira-t-elle à remplir cette mission qui relève, in fine, de la dissuasion ? « Nous sommes prêts à faire face à toute éventualité », assure Stephen Capehart, qui confie n'avoir jamais vu autant de balles réelles tirées lors d'une préparation opérationnelle.
Stocks de munitions
Au Pentagone, à Washington, on admet qu'il faut renforcer les deux dernières brigades américaines encore basées en Europe (la brigade Stryker du 2e de Cavalerie, déployée en Allemagne, et la 173e brigade aéroportée, localisée en Italie). D'où la décision de reconstituer des stocks prépositionnés de munitions et d'équipements. « Le matériel d'une autre brigade blindée sera stocké en Allemagne et au Benelux. Quant à la 3e brigade, qui sera remplacée par une autre unité à l'issue de ses neuf mois en Europe, elle va être appuyée par une brigade d'hélicoptères de 1 700 hommes », confie un responsable militaire américain.
C'est donc l'équivalent d'une division blindée américaine qui sera opérationnelle en Europe, à partir de 2017. « Et ce ne sont pas des unités qui sont là pour faire de la figuration, précise James Townsend. Il s'agit que nos forces et notre détermination soient parfaitement vues par les Russes. »
Un tel déploiement se fait sous la bannière étoilée des USA, pas sous celle de l'Otan. « C'est bien une initiative américaine, confirme le major Crighton, de la 4edivision d'infanterie. La 3e brigade dépendra du commandement de l'US Army Europe. »
À Fort Carson, les soldats se préparent à passer Noël en famille. Mi-janvier, une quinzaine d'appareils de transport vont les acheminer en Pologne puis les unités se disperseront dans les pays frontaliers de la Russie. Si la 1re classe Abriana Archuleta, la plus jeune engagée de la brigade, cache mal sa nervosité derrière un grand sourire, ses camarades partent plus décontractés. « J'ai fait deux séjours en Afghanistan et un en Irak, explique le sergent-chef O'Connell. L'Europe, ce sera moins stressant. On ne part pas pour la guerre. »
(ouest-france.fr | Publié le 20/12/2016 )
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