Par RFI Publié le 01-01-2017
Au moins 39 personnes ont été tuées et une soixantaine d'autres blessées dans une attaque contre une célèbre boîte de nuit à Istanbul, la Reina, dans la nuit de ce samedi 31 décembre à ce dimanche 1er janvier, a annoncé le ministre de l'Intérieur turc ce dimanche matin. Il s'agit de la sixième attaque en moins d'un an. L'assaillant court toujours et l'attaque n'a pas encore été revendiquée au moment où le président Erdogan réaffirme la détermination de la Turquie à détruire les menaces à leur source.
Avec agences et nos correspondants en Turquie, Anne Andlauer et Alexandre Billette
Un conseil de sécurité exceptionnel s'est tenu à la mi-journée à Istanbul sous la direction du Premier ministre Binali Yildirim mais sur les réseaux sociaux et dans les médias, des questions apparaissent déjà : par exemple comment un homme a pu entrer, armé, dans une discothèque connue pour contrôler sa clientèle... Autre sujet de polémique, les injonctions de plusieurs mouvements islamistes et aussi, de journaux ultranationalistes qui avaient appelé les Turcs à ne pas fêter l’arrivée du 1er janvier, une fête qui n’est pas à leurs yeux compatible avec l’islam. Ainsi le quotidien Milli avait notamment fait sa Une hier avec cette phrase à postériori glaçante : ne célébrez pas le Nouvel an, ceci est le dernier avertissement.
Sur les réseaux sociaux justement et dans les témoignages de personnes à Istanbul, un mot revient souvent ce dimanche : « Bataclan ». « C’est notre Bataclan », disent les Turcs. « Nous avons eu un répit de quelques heures, de quelques minutes, pour fêter le Nouvel an », disait une jeune Turque qui était sur place dans la discothèque cette nuit. « Et déjà c’est l’enfer qui recommence », se lamente-t-elle. Selon le président Erdogan, dans un communiqué rendu public par la présidence, cette agression visait à « semer le chaos dans le pays », mais « en tant que nation, nous combattrons jusqu'au bout non seulement les attaques armées de groupes terroristes et les forces derrière eux, mais aussi leurs attaques économiques, politiques et sociales » a-t-il assuré.
Des victimes étrangères
Le bilan de l'attaque s'est alourdi au fil de la matinée. Selon des informations délivrées par le ministre de l'Intérieur ce dimanche matin, ce sont 39 personnes qui ont perdu la vie dans l'attaque. 21 ont déjà été identifiées et parmi elles figurent 15 étrangers parmi lesquels des personnes de nationalité saoudienne, marocaine, libanaise, libyenne, israélienne et belge. Par ailleurs 69 personnes ont été blessées dont quatre sont dans un état grave.
Le ministre français des Affaires étrangères l'a annoncé à la mi-journée : quatre Français ont été blessés dans l'attaque, condamnée « avec force et indignation » par le président Hollande qui a exprimé sa « solidarité avec la Turquie dans cette épreuve ».
Selon le ministère israélien des Affaires étrangères, une ressortissante israélienne a disparu et une autre serait parmi les victimes. La Turquie est l'une des destinations favorites des touristes israéliens.
Un homme armé
L'auteur présumé de l'attaque est activement recherché. Selon les premières images des caméra de surveillance c’est un homme, seul qui a ouvert le feu sur la foule. « Les recherches pour retrouver le terroriste sont toujours en cours. J'espère qu'il va être rapidement capturé », a déclaré le ministre turc de l'Intérieur Süleyman Soylu. La police est à ses trousses. Plus de 17.000 agents étaient déjà mobilisés à Istanbul en cette nuit du Nouvel An.
Selon les premiers éléments confirmés par le gouverneur de la ville Vasip Sahin, peu après l'attaque, un homme -déguisé en père Noël selon certaines sources- a fait irruption dans l’établissement vers 1 heure 15 du matin, alors que plusieurs centaines de personnes turques et étrangères célébraient le passage à la nouvelle année.
L’assaillant a d’abord abattu un policier devant la boîte de nuit, avant d’entrer à l’intérieur et de tirer de longues rafales dans la foule. Un employé de la discothèque a raconté à la presse turque que les clients s’étaient jetés à terre dans la panique, certains – comme lui – parvenant à se réfugier en sous-sol. Une femme, dont le mari a été touché à trois reprises, elle aussi projetée à terre, a décrit une forte odeur de poudre et raconté comment des dizaines de personnes l’avait piétinée dans leur fuite,
avant qu’elle ne s’évanouisse.« Je me tenais à l’opposé de là où ça a commencé, et les gens ont commencé à courir, mon mari m’a dit « ne t’inquiète pas » et il m’a protégé avec son corps. Les gens marchaient sur nous, mon mari a été touché par trois balles. J’ai écarté les gens qui étaient contre moi et j’ai vu mon mari qui était en sang, les gens étaient blessés, certains avaient les yeux ouverts, d’autres les yeux fermés. C’était terrifiant », raconte-t-elle.
Piégés à l’intérieur, des clients se sont jetés à l’eau pour échapper aux balles. Plusieurs témoins encore ont décrit des personnes tentant de s’échapper portant des blessés, et expliqué que la police était intervenue rapidement.
Il s’agit clairement d’une « attaque terroriste », a ajouté le gouverneur dans une brève déclaration à la presse peu après l'attaque.
Le club Reina, une discothèque très courue
La cossue boîte de nuit Reina, lieu de l'attentat, est un haut lieu de la vie nocturne à Istanbul, prisé de la jeunesse branchée, des artistes et célébrités et des touristes étrangers. En dépit de l'islamisation croissante de la société dont se plaignent les détracteurs du président Recep Tayyip Erdogan depuis que son parti est au pouvoir, le club Reina est resté l'un des repaires incontournables de la jet-set turque et des fêtards pas trop regardants sur la dépense. Jusqu'ici synonyme de fête, le nom de Reina sera désormais associé à ce massacre commis pendant la célébration du Nouvel An.
Le sixième attentat en moins d'un an
Ce nouvel attentat – le sixième à Istanbul en moins d’un an – survient alors que toutes les polices de la ville et du pays étaient sur le qui-vive en cette soirée du Nouvel An.
Un peu plus tôt dans la journée, les autorités avaient annoncé l’arrestation de huit membres présumés de l'organisation Etat islamique (EI) à Ankara, soupçonnés de préparer une attaque imminente contre la capitale.
En attendant plus de précisions, « les Etats-Unis condamnent dans les termes les plus vifs l'horrible attaque terroriste contre une discothèque d'Istanbul », a déclaré Ned Price, porte-parole du Conseil de sécurité nationale. « De telles atrocités perpétrées sur des innocents venus pour la plupart célébrer le Nouvel An souligne la sauvagerie des assaillants. »
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