mercredi 21 décembre 2016

Le Mékong au rythme d'une croisière




Sur le bateau navigant sur le fil du Mékong, histoire et vie locale se mêlent et nous dévoilent la réalité d'Asie du Sud-Est. | Yves Hardy

Yves HARDY

La descente du fleuve en bateau, des temples d'Angkor (Cambodge) jusqu'à son delta vietnamien, révèle l'étonnant mode de vie des peuples de l'eau.

Porte d'entrée royale

L'avion à peine posé à Siem Reap (Cambodge), nous découvrons le fabuleux site d'Angkor. Enchantement suscité par les visages de pierre au sourire énigmatique du Bayon et le temple du Ta Promh, prisonnier des arbres fromagers géants. À proximité, s'étale le plus grand lac d'eau douce d'Asie du Sud-Est, le Tonlé Sap. Sa superficie quintuple pendant la mousson.

Entre deux villages lacustres, des pêcheurs plongent leur carrelet dans les eaux poissonneuses. Maisons et commerces, y compris une station-service, sont bâtis sur pilotis. Les enfants manient aussi la pagaie pour se rendre à l'école et glissent leur pirogue entre les jacinthes d'eau qui colonisent l'espace.

Le navire, à taille humaine (48 passagers), multiplie les escales. Lors de l'une d'elles, Parang, père de famille de l'ethnie Cham, signale : « Ces plantes envahissantes sont un défi, mais la construction de barrages en amont sur le Mékong, en Chine et au Laos, représente le plus grand danger pour notre écosystème. »

La croisière reprend sur le fleuve. Depuis les coursives on aperçoit des chars à bœufs dans un paysage de rizières, piquetées de palmiers à sucre ou de stupas (des pagodes bouddhistes).

Symphonie de couleurs

L'ambiance apaisée s'anime à l'approche d'un marché flottant où, sur les berges, des étals regorgent de légumes et fruits exotiques. C'est le cas à Kompang Chhnang ou plus loin à Sa Dec, en pénétrant au Vietnam. Là, le vert des haricots longs se mêle aux teintes orangées des mangues et au rouge écarlate des ramboutans (litchis chevelus), le tout embaumé par l'odeur si particulière et entêtante des durians.

Surprise, à côté des sacs exposant des dizaines de variétés de riz, des vendeuses proposent du « pain à la française », héritage de la présence coloniale. Autour de Châu Dôc, la pisciculture est reine et l'élevage intensif. Dans les cages construites sous le plancher des maisons flottantes, s'ébrouent des carpes rouges et d'énormes poissons-chats dont les filets sont exportés par tonnes vers les supermarchés occidentaux.

Saïgon, vigie du delta

Nous croisons des jonques et sampans (embarcation typique de l'Asie), ainsi que des barques dont la proue est ornée d'un œil peint censé conjurer le mauvais sort. Tel un « Shiva aquatique », le Mékong joue bientôt de ses neuf bras. Nous empruntons l'un des canaux qui irriguent le delta et son humanité laborieuse penchée sur les plants de riz dont elle tire trois ou quatre récoltes par an.

Le calme agréable de la navigation s'évanouit à l'approche de Saïgon. La cité trépidante du Sud, rebaptisée Hô Chi Minh-Ville, forte de dix millions d'habitants, charrie un flot ininterrompu de motos.

Abasourdis, nous retrouvons un brin de sérénité - et nos repères - dans la vieille ville où trônent la cathédrale Notre-Dame et la poste centrale à la charpente métallique conçue par Gustave Eiffel. Prévisibles, les cartes postales envoyées par les participants mentionnent comme un leitmotiv, une « croisière inoubliable ».

(ouest-france.fr | Aout 2016)



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