Par Gaëlle Laleix
Diffusion : jeudi 10 novembre 2016
Un troupeau de boeufs au Nigeria, non loin de la frontière avec le Niger et le Tchad. ISSOUF SANOGO / AFP
Au Nigeria, 36 personnes ont été tuées lundi dans l'Etat de Zamfara, au nord du pays. On ne l'a appris que le 9 novembre. Des mineurs et des vendeurs d'or ont été abattus par des voleurs de bétail. Arrivés à moto, les assaillants sont entrés dans les tunnels de la mine de Bindi et ont tiré. L'orpaillage est une activité de complément pratiquée par les éleveurs de la région. Depuis des mois, ils sont victimes de raids par des groupes armés de voleurs qui font régner la terreur dans le Nord du pays.
300 000 têtes de bétail ont été volées au nord du Nigeria en 2016. Les bandits s’accaparent des animaux dont ils vendent la viande sur les marchés de la région. Le trafic est bien organisé selon Mohammed Bello, secrétaire général de la Confédération de l'élevage traditionnel au Nigeria. « Les voleurs emmènent les bêtes dans des zones où ils les abattent la nuit comme la forêt de Sambisa, au nord-est du pays. Puis ils écoulent la viande dans les marchés comme Kaduna, Katsina, Zamfara, Kano, Adamawa et même Karaba. C'est une énorme économie criminelle. Ils sont très organisés: il y a ceux qui guettent, ceux qui volent, ceux qui transportent le bétail, ceux qui l'abattent. Ce trafic rassemble plusieurs groupes ethniques et plusieurs corps de métier: des agriculteurs, des éleveurs, des distributeurs et des transporteurs. »
Insécurité transfrontalière
C'est pendant l'insurrection de Boko Haram que les vols ont commencé à se généraliser. Aujourd'hui le groupe islamiste est en pleine débandade mais l'insécurité persiste. Elle passe même de l'autre côté de la frontière, au Niger. « Aujourd’hui, dans toute la bande Sud de Maradi, l’insécurité est à son paroxysme, » explique Hassane Baka, éleveur dans la région. « C’est une longue frontière, très poreuse. Les voleurs viennent armés, ils tuent parfois les éleveurs, prennent leurs animaux et s’en vont. C’est un véritable no man’s land qui est en train de se créer tout au long de cette frontière. » Les voleurs profitent en effet de la forêt de Babaradi pour y cacher leur butin, abattre les animaux et transformer la viande qui sera revendue.
Nouveaux couloirs de transhumance
Le Nigeria est le premier marché d'exportation de bétail pour le Niger, le Tchad et le Cameroun. Avec l'insécurité, les routes de transhumance traditionnelles sont délaissées par les éleveurs sahéliens qui se tournent vers de nouveaux circuits. « Comme les éleveurs n’arrivent plus à aller sur les marchés et à nourrir leurs animaux convenablement, ils se sont déplacés », détaille Pascal Rouamba, responsable élevage pour la Coopération suisse. « Un nouveau couloir est en train de s’ouvrir. Il va du sud-est du Burkina vers le centre du Nigeria en passant par le Nord du Bénin. Cela entraîne des difficultés car ce sont des routes où il n’y pas d’infrastructures et de services. Les éleveurs ont besoin de parcs à bétail, de marchés, de postes vétérinaires, d’aires de repos… »
Aujourd'hui, un bœuf vaut 150 000 nairas, au nord du Nigeria, soit 430 euros. Le vol de bétail représente donc un manque à gagner de 130 millions d'euros pour les éleveurs du nord du Nigeria.
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