samedi 5 novembre 2016

Alstom et Bombardier sont en passe de décrocher le contrat du siècle


Par Patricia Lecompte
Diffusion : mercredi 2 novembre 2016


Le Pdg de Bombardier transport France, Laurent Bouyer à l'usine de Crespin près de Valenciennes. ©REUTERS/Benoit Tessier


Leurs carnets de commandes se vidaient inexorablement. Ils devraient à nouveau se remplir grâce à une commande de 3 milliards d'euros. Après le sauvetage in extremis de son usine de Belfort par l'Etat, l'avenir d'Alstom pourrait se dégager.

Engagée dans la lutte contre le « tout voiture », la région Ile-de-France poursuit le développement des transports en commun. Face aux difficultés quotidiennes de déplacement des Franciliens, réseaux vétustes, trains insuffisants et retards récurrents sur de nombreuses lignes, la SNCF et le syndicat des transports en commun de l'Ile- de-France, le Stif, ont décidé d'améliorer le parc roulant. En mai 2013, ils lançaient un appel d'offres pour la construction de 270 rames de RER NG, nouvelle génération, à deux niveaux, pour un montant d'environ 3 milliards d'euros. Un contrat historique que certains ont qualifié de « contrat du siècle ». Un contrat surtout exceptionnel, car les commandes ferroviaires en France sont devenues rares.

Trois candidats ont postulé. Bien évidemment Alstom s'est tout de suite mis sur les rangs. Plus qu'une opportunité c'est une aubaine pour le constructeur français qui menaçait, il y a quelques mois encore de fermer son site de Belfort faute de contrats. Une crainte prise au sérieux par le gouvernement qui lui a passé in extremis une commande d'une vingtaine de TGV afin d'éviter tout remous social a quelques mois de l'élection présidentielle.

Très intéressé également par l'offre, le Canadien Bombardier, concurrent d'Alstom. Ils se sont associés pour peser plus lourd et augmenter leurs chances. Tout comme Alstom, Bombardier France connaît d'importantes difficultés et a déjà prévenu qu'au premier trimestre 2019 son site de Crespin dans le Nord risque de se retrouver à l'arrêt faute de commande. Enfin le troisième candidat est l'Espagnol CAF, qui détient une usine en France à Bagnères-de-Bigorre. Lui aussi a agité le chiffon rouge et informé que dès la fin 2018, il n'aurait plus assez de travail sauf s'il remportait le marché. Au final, Alstom et Bombardier France devraient remporter le marché. Les constructeurs devraient en effet se partager l'un des plus gros contrats de l’histoire du ferroviaire. La construction des futurs trains devrait se faire dans l'usine de Valenciennes, dans le nord de la France pour Alstom et dans l'usine de Crespin pour Bombardier. Les deux sites étant à quelques kilomètres l'un de l'autre.

Plus qu'une bouffée d'oxygène, c'est l'avenir des deux constructeurs qui se redessine, car cette commande, c'est du travail pour 3 200 salariés des deux groupes jusqu'en 2022. C'est évidemment une excellente nouvelle pour Alstom et Bombardier, c'en est une moins bonne pour leur concurrent espagnol, CAF, qui a été écarté. La pilule passe d'autant plus mal que CAF était bien positionné : son offre était la moins chère des trois. S'agit-il d'un choix politique de la part de la SNCF ? En coulisse, le gouvernement aurait-il pu faire pression pour privilégier l'emploi français à six mois de la campagne présidentielle ?

Pour quelles raisons, le concurrent espagnol n'a pas été retenu ?

La situation était délicate car les trois candidats souffrent des mêmes maux : un carnet de commandes clairsemé et des emplois menacés. Afin d'éviter toute accusation de favoritisme, la SNCF a dépêché un cabinet d'audit afin d'évaluer la capacité de production industrielle du postulant espagnol. Le cabinet de conseil a conclu que le mieux à même de répondre est le consortium abritant Alstom et Bombardier. CAF aurait été éliminé car jugé trop petit, donc dans l'incapacité de tenir la cadence et produire 70 trains par an.

CAF n'emploie qu'une centaine de salariés contre 2 200 pour Bombardier à Crespin et 1 000 pour Alstom à Valenciennes. Un argument irrecevable pour CAF qui prévoyait l'embauche de 500 salariés dans la région, tout en maintenant un prix plus compétitif que ses concurrents.

Mais en période électorale le calcul est vite fait : 3 200 emplois menacés dans le nord contre 500 embauches dans le Sud-Ouest. Des chiffres qui parlent d'eux-mêmes.

(RFI)



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